Narcissisme : entre amour de soi et pièges de l’ego
- Florence Martinho
- 22 août
- 2 min de lecture
On entend souvent dire : "il est narcissique", comme si le mot voulait simplement dire "il s’aime trop". En réalité, le narcissisme est une notion bien plus profonde et universelle : il touche chacun d’entre nous, dans notre rapport à nous-mêmes et dans nos relations avec les autres.
Le narcissisme, de quoi parle-t-on au juste ?
Le narcissisme, c’est la manière dont nous vivons la relation avec nous-mêmes.
Est-ce que je m’aime ?
Est-ce que je me dévalorise ?
Est-ce que je me juge ou au contraire est-ce que je m’admire ?
Tout cela fait partie du narcissisme. Il ne s’agit donc pas seulement d’un excès d’amour-propre, mais de l’ensemble des émotions et des jugements que nous portons sur nous-mêmes.
Et comme cette relation à soi est toujours présente, elle influence forcément nos liens aux autres.
L’autre comme miroir
Freud parlait du "Nebenmensch" pour désigner l'autre, son prochain qui est à la fois différent et semblable à moi. C’est parce que je reconnais en lui quelque chose de moi que je peux éprouver de l’empathie, ou m’identifier.
Mais lorsque cette reconnaissance échoue, le rapport à l’autre se complique : rejet, méfiance, voire haine. L’autre devient alors le miroir déformé de ce que je ne supporte pas en moi.

Le mythe de Narcisse et d’Écho
Le récit d’Ovide illustre parfaitement les paradoxes du narcissisme :
Narcisse découvre son reflet dans l’eau et en tombe amoureux. Mais cet amour est impossible : fasciné par sa propre image, il reste figé et finit par s’anéantir. Trop d’amour de soi peut donc devenir destructeur.
Écho, de son côté, est condamnée à répéter les paroles des autres sans jamais pouvoir parler pour elle-même. Amoureuse de Narcisse, elle ne peut qu’exister à travers lui. Rejetée, elle s’éteint peu à peu, jusqu’à disparaître complètement.
Deux destins opposés, mais tout aussi tragiques :
S’aimer à l’excès jusqu’à se perdre.
S’effacer totalement dans l’amour de l’autre jusqu’à disparaître.
Trouver l’équilibre
Le narcissisme est donc un jeu d’équilibre permanent :
S’aimer assez pour exister, s’affirmer, se sentir digne.
Ne pas s’aimer trop au point de se couper des autres.
Aimer l’autre sans s’y dissoudre ni s’y effacer.
Le narcissisme ne doit pas être compris seulement comme une pathologie mais comme une dimension essentielle de l’existence humaine : Il est à la fois moteur d’identité et source de fragilité, Il ouvre à l’empathie mais peut aussi mener au rejet, Il est amour de soi, mais aussi miroir tendu vers l’autre. C’est une réalité humaine fondamentale, à la croisée de l’amour de soi et du lien à l’autre.
Le mythe de Narcisse et d’Écho nous rappelle que deux écueils nous guettent : se perdre dans l’adoration de soi, ou s’effacer dans la dépendance à l’autre.
Entre ces deux extrêmes, il nous revient d’inventer chaque jour une relation à soi et aux autres qui soit vivante, équilibrée et humaine.
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